Bienne : Soumise en votation le 3 mars, la révision totale du Règlement de la Ville introduit un nouvel article sur la participation populaire. D’accord sur le fond, les élus sont cependant divisés sur la manière, détaillée dans des alinéas.
Les Infoquartiers biennois donnent Lieu à des rencontres entre les habitantes et habitants d’un quartier, qu’importe Leur milieu social ou leurs origines. archives Peter Samuel Jaggi Julie Gaudio Entamée en 2017, la révision totale du Règlement de la Ville de Bienne pourrait connaître son épisode final, lors des votations du dimanche 3 mars. Les ayants droit sont en effet invités à accepter cette nouvelle «Constitution» communale, inchangée depuis 1996. Décortiqué dans les moindres détails, le texte comporte quelques adaptations à la société actuelle. A commencer par l’article 6, intitulé «Participation de la population».
Celui-ci a donné lieu à de vifs débats lors des deux lectures au Conseil de ville. Si tout le monde s’accorde pour affirmer qu’il est important que les habitantes et habitants participent activement à la vie publique et expriment leur avis, les opinions divergent quant à la manière de le faire. L’alinéa 2 de l’article 6 en détaille certaines. Le premier point prévoit de «faire participer de manière appropriée des organisations de quartier» dans des affaires les touchant particulièrement. Quant à savoir lesquelles précisément, le texte ne le dit pas.
«Je pense qu’il s’agit plutôt des guildes ou associations de quartiers, pas des Infoquartiers», avance Isabel Althaus. Organisations de quartier Quoi qu’il en soit, la responsable du département Générations & Quartiers de la Ville de Bienne se réjouit que le travail effectué depuis tant d’années soit mis en lumière dans la nouvelle «Constitution». «Les Infoquartiers sont installés dans des endroits moins privilégiés, afin de toucher une population plus éloignée des processus politiques, notamment les jeunes et les personnes issues de la migration», éclaire-t-elle. «Nous construisons nos activités et projets en fonction de leurs préoccupations. Nous en quelque sorte les mesures à leur disposition: les soutenir pour la demande d’un bon de garde pour les crèches, les orienter vers les bonnes personnes s’ils se posent des questions sur la sécurité du chemin de l’école, etc.
» Le département de l’Urbanisme se sert en outre de ces lieux de rencontres afin d’attirer davantage de personnes, ou celles qui s’expriment moins, pour des consultations sur des projets de réaménagement. Récemment, des ateliers concernant la place de la Croix ont ainsi été organisés dans les différentes offres de l’Infoquartier de Madretsch. L’objectif était ainsi de toucher également des populations plus éloignées des processus de consultation. «Nous nous adaptons aux publics ciblés. Pour une place de jeux par exemple, nous allons demander aux enfants leur avis à travers des ateliers concrets et ludiques», précise Isabel Althaus.
Membre de la commission parlementaire chargée de la révision du Règlement de la Ville, la conseillère de ville Marie Moeschler, du Parti socialiste romand (PSR), est convaincue de l’importance de ces organisations de quartiers. «Les récentes consultations publiques prouvent que la population aime participer lorsqu’on le lui propose. Raison pour laquelle il est sensé de l’inscrire dans la nouvelle mouture de la Constitution»), appuie-t-elle. Interventions populaires Plus critiqué, le point suivant offre la possibilité à celles et ceux qui le souhaitent, même s’ils ne disposent pas du droit de vote communal, de déposer des interventions parlementaires au Conseil de ville. A droite, on craint que cette mesure ne «court-circuite» le processus politique actuel et n’alourdisse la charge de l’Administration.
«Le Parlement devrait pouvoir garder son rôle d’intermédiaire entre la population et l’Exécutif. Les habitantes et habitants peuvent s’approcher des 60 membres du Conseil de ville et nous soumettre leurs préoccupations», défend Daniel Suter, du Parti radical romand (PRR). L’élu craint aussi que cette mesure ne profite qu’à un petit groupe de personnes bien informées, voire militantes. «Pour moi, elle n’est pas un moyen pertinent d’encourager la participation politique.» Sa collègue du Conseil de ville, Sandra Schneider (UDC) abonde en son sens.
«Il existe suffisamment de possibilités de contacter les parlementaires. Notre rôle est d’être à la disposition de celles et ceux qui nous ont élus», argue-t-elle. «En outre, à Berthoud (Burgdorf) et Berne, la possibilité pour le peuple de déposer des interventions parlementaires n’est presque jamais utilisée.» Marie Moeschler confirme que Bienne ne serait pas pionnière en la matière. D’autres villes romandes proposent cette mesure.
«Je trouve qu’il est normal que des étrangers, qui payent leurs impôts et leurs charges sociales, puissent s’exprimer par ce biais. Il s’agit d’une proposition, pas d’une obligation», rappelle-t-elle. «Certaines et certains se méfient parfois de leurs élus et n’osent pas les approcher. Même si je déplore ce fait, on ne peut pas le nier.» Le Parlement des jeunes Enfin, l’article 6 remet sur la table le Parlement des jeunes, dans un troisième point.
Il a certes déjà existé par le passé, et n’est pas forcément voué à réapparaître dès l’introduction du nouveau Règlement, le 1er janvier 2025. «Si un groupe de jeunes de nos Infoquartiers sont motivés, nous pourrions tout à fait les accompagner dans leur démarche, comme ne le faisons pour d’autres projets», assure Isabel Althaus. «Toutefois, je ne pense pas qu’il s’agisse du meilleur moyen pour les encourager à s’engager en politique. Les expériences du passé montrent que ce sont surtout des étudiants formés ou des personnes déjà encartées dans les partis qui participent. Le Parlement ne permet ainsi pas de toucher celles et ceux issus des milieux plus défavorisés.
Pour eux, la priorité est souvent ailleurs: trouver Savoie ou une place en apprentissage. Ils ont également d’autres possibilités d’entreprendre, par exemple en organisant des projets concrets liés à leurs intérêts.» La question des ressources influence par ailleurs la réussite du Parlement des jeunes. «Il fonctionne dans des villes qui y mettent les moyens. Mais à Bienne, nous n’avons pas les capacités pour cela», estime Isabel Althaus.
Marie Moeschler s’appuie sur les exemples des autres communes pour défendre l’instauration d’un tel organe. «Il permet aux jeunes d’aborder des sujets qui les touchent particulièrement, sans devoir supporter de longs débats sur les finances biennoises», sourit-elle. A prendre ou à laisser? Malgré des avis divergents, ce nouveau Règlement de la Ville doit-il être directement jeté aux ordures? «Même si l’article 6 n’est pas nécessaire, nous recommandons d’accepter cette révision. Dans l’ensemble, beaucoup de points sont positifs pour l’UDC», salue Sandra Schneider. «Cette révision respecte les vœux du peuple, car deux initiatives ont été intégrées: l’interdiction des doubles mandats pour les conseillers municipaux et la limite de leurs salaires.
» En tant que membre de la commission parlementaire, Marie Moeschler encourage naturellement la population à griffonner un «oui» sur le bulletin. «Tout le monde n’est peut-être pas satisfait de tout, mais c’est le jeu politique. Cette révision résulte d’un consensus», souligne-t-elle. Daniel Suter ne cache pas en revanche qu’il rejettera cette révision, à titre personnel. «Tout n’est pas à jeter, mais certains points sont inacceptables.
Il faudrait selon moi en rediscuter», conclut-il. D’autres outils pour participer Outre l’article 6, la révision totale du Règlement de la Ville de Bienne inclut d’autres changements dans le domaine de la participation populaire. Les seuils de signatures nécessaires pour lancer un référendum facultatif et une initiative populaire ont par exemple été abaissés. Dans le premier cas, 800 ayants droit peuvent demander une votation populaire sur des arrêtés du Conseil de ville, contre un vingtième d’entre eux actuellement, soit environ 1500 personnes. De même, 2000 citoyennes et citoyens disposant du droit de vote communal peuvent déposer une initiative, contre un quinzième d’entre eux à présent, ce qui représente tout de même quelque 2000 personnes.
La différence dans ce cas n’est pas forcément énorme. La nouveauté réside cependant dans le mode de calcul: les seuils sont désormais fixes, qu’importe le nombre d’ayants droit (30’435 personnes au 30 janvier 2024.
Source: Journal du Jura